Le théâtre grec de Syracuse se situe sur le versant Sud de la colline Temenite, surplombant la ville moderne de Syracuse dans le Sud-Est de la Sicile. Il a été construit au V° siècle avant J.-C., reconstruit au III° siècle avant J.-C. et rénové à nouveau pendant la période Romaine.
L'existence d'un théâtre à Syracuse est attestée à la fin du V° siècle avant J.-C. par le mime et auteur Sophron, qui donne le nom de l'architecte, Damokopos, surnommé "Myrilla" parce qu'il avait fait un usage intensif de parfum ("myrrha") lors de l'inauguration. Cependant, il n'a pas été démontré que ce passage mentionne ce monument précis et il peut se référer à un autre théâtre à un autre emplacement.
Théâtre Grec
Le théâtre dessine un demi-cercle si parfait qu'il semble tracé au compas. Il épouse tellement bien la pente de la colline que sa structure semble faire partie intégrante du paysage. Loin d'être une impression subjective, c'est en fait une de ses caractéristiques, car il a été taillé d'un seul tenant dans la roche au V° siècle avant J.-C.. Dès l'Antiquité, il était célèbre dans toute la Grande Grèce pour ses proportions monumentales et son rayonnement culturel. Les représentations pouvaient accueillir 18 000 specta-teurs. Les Perses d'Eschyle y furent donnés pour la première fois vers 470 avant J.-C.. Les gradins supérieurs ont été détruits par les Espagnols pour bâtir les fortifications d'Ortygie. La cavea est séparée en deux parties par un promenoir (diazoma) sur lequel sont gravés des noms de divinités et de souverains en alphabet grec. Les Romains modifièrent ce chef-d’œuvre pour l'adapter aux jeux du cirque avant de l'abandonner au profit de l'amphithéâtre en contrebas. La scène garde les traces des moulins à eau qui y furent installés au XVI° siècle.
L'aire sacrée se déploie sur le sommet de la colline derrière la cavea du théâtre Grec.
Charles Diehl, historien et spécialiste de l'Empire byzantin, décrivait ainsi ce monument en 1907 :
Sur la pente méridionale du plateau de l'Achradine, le grand théâtre creuse dans le roc vif l'hémicycle immense qu'emplissent encore quarante-six rangées de gradins. C'était
le plus grand théâtre de la Sicile, l'un des plus vastes du monde hellénique. Il mesure 150 mètres de diamètre, et les soixante rangées de gradins qui primitivement en
garnissaient la courbe pouvaient donner place à 24 000 spectateurs. C'est aujourd'hui encore un des plus beaux monuments de Syracuse et des mieux conservés. Sans doute,
de la scène, large de 30 mètres environ et profonde de 8, il subsiste peu de chose ; mais on voit, comme jadis, les deux larges précinctions qui coupent à des hauteurs diverses
la montée des gradins, les huit escaliers qui, partant de l'orchestre, partagent le théâtre en neuf travées , les tunnels creusés dans le roc qui servaient d'entrées
latérales, les onze gradins inférieurs, autrefois revêtus de marbre, et qu'un degré assez élevé sépare des places du haut réservées au populaire. En certains endroits
on lit encore des inscriptions, datant du III° siècle, qui plaçaient certaines travées sous le patronage de Zeus Olympien ou d'Hercule, ou encore des reines Philistis et Néréis,
parentes de cet Hiéron II qui termina et embellit, à ce qu'il semble, le théâtre
construit au v° siècle par Hiéron Ier. Et tout naturellement, l'esprit se reporte au temps où Syracuse était une des métropoles de l'Hellade, où des souverains artistes
et lettrés faisaient représenter sur cette scène les tragédies d'Eschyle et les comédies d'Epicharme, où des spectateurs innombrables applaudissaient ici les vers de Sophocle ou
d'Euripide avec le même enthousiasme qui, dans le théâtre de Dionysos, faisait battre les mains des Athéniens. Et aussi bien est-ce le ciel de Grèce, avec des tons à peine
plus atténués et plus tendres, qui éclaire l'admirable paysage qu'on découvre des gradins du théâtre, et c'est la même splendeur de la lumière sur une terre plus riche
seulement, plus grasse, plus verdoyante, où semble flotter comme le souvenir des pastorales idylles de Théocrite.
Sur l'aire sacrée du théâtre débouche d'une grotte souterraine l'eau canalisée depuis la vallée de l'Anapo par l'aqueduc construit sous le règne de Gélone vers 480 avant J.-C.. Dans la paroi sont sculptés des pinakes, cartouches dédiés aux défunts. Le long de la via dei Sepolcri qui borde la roche, des tombes byzantines ont été creusées près de sépultures grecques.
Grotta del Ninfeo
La Grotta del Ninfeo est une cavité artificielle creusée dans la roche de la colline de Temenite (nommée d’après le grec temenos, « enceinte sacrée »), située dans le parc archéologique de Neapolis à Syracuse.
Elle est située près de la partie la plus haute du petit relief rocheux, sur une terrasse rectangulaire qui frôle le théâtre grec, et s’ouvre au centre d’un mur de pierre où se trouvait autrefois un portique fermé en forme de « L ». A l’entrée, il y avait des statues dédiées aux Muses dont trois (datées du II° siècle avant J.-C.) sont encore conservées et exposées au Museo archeo-logico regionale Paolo Orsi de Syracuse.
La fontaine est dédiée au culte grec antique des Nymphes, déesses de la nature. Le nom nymphée donné à une fontaine monumentale et décorée en dérive. On pense que le nymphée de Syracuse était l’ancien emplacement de la Mouseion (le sanctuaire des Muses), siège de la guilde artistique, où les acteurs de Syracuse se rassemblaient avant de descendre dans le théâtre pour monter des comédies et des tragédies à l’époque d’Épicharme et d’Eschyle.
À côté de son entrée, il y a quelques édicules votifs qui ont été utilisés pour les cultes des héros (Pinakes). L’eau qui se jette dans la Grotta provient de deux aqueducs distincts, tous deux d'époque grecque ; l’un est appelé Acquedotto del Ninfeo (Aqueduc du Nymphée), tandis que l’autre est l’aqueduc de Galermi.
La ville de Syracuse était alimentée par quatre aqueducs. Le plus long, l’aqueduc Galermi, amenait l’eau depuis Bottiglieri, à 29 kilomètres de distance ; l’aqueduc Paradiso avait 1 650 mètres de long, l’aqueduc Ninfeo 1 385 mètres et le Tremilia 815 mètres. Les trois aqueducs plus petits sont entièrement souterrains, avec des regards à intervalles réguliers, et tous ont un second tunnel taillé dans le rocher immédiatement au-dessus d’eux. Ce dispositif avec deux tunnels superposés ne se trouve nulle part ailleurs, sauf pour le tunnel de Samos, où la galerie inférieure a été aménagée à partir de la galerie supérieure pour corriger un défaut de chantier et ménager une pente correcte pour l’écoulement de l’eau. Ces trois aqueducs de Syracuse pourraient dater du III° siècle avant J.-C., en liaison avec le programme de renouvellement urbain entrepris entre 270 et 215.
Sources
Textes :
Aqueducts and Water Supply in Greek and Roman Sicily, R. J. A. Wilson, in Revue archéologique 2002/2 (n° 34),
Éditions Presses Universitaires de France
Grotta del Ninfeo, en.wikipedia.org
Les villes d'art célèbres, Palerme et Syracuse, Charles Diehl, H. Laurens Editeur, 1907
Sicile, GeoGuide, 2005
Théâtre grec de Syracuse, fr.wikipedia.org
Plans :
Frank Sear, Roman theatres - An Architectural Study, Oxford University Press, 2006
Sicile , Guides-Voir, Hachette, 2003
Photos numériques : 2023